A l’image des pédagogies de type Montessori, l’objectif final de l’approche Waldorf-Steiner est de permettre aux enfants de développer de manière autonome une soif d’apprendre censée les amener beaucoup plus loin que les élèves apprenant par la contrainte.
Néanmoins la comparaison s’arrête la. Au contraire de Montessori, cette pédagogie s’appuie sur un substrat spirituel (pour ne pas dire religieux) qui l’inspire sans que celui-ci soit formellement enseigné dans les classes. Il s’agit de l’anthroposophie : une approche développée au début du siècle par un humaniste autrichien Rudolf Steiner et qui, dans une lecture littérale, est assez discutable et occupe part intermittence les fonctionnaires de la Mission d’Information et de Vigilance contre les Dérives Sectaires
Waldorf-Steiner : Éduquer le cœur, la tête et les mains
La pédagogie Waldorf Steiner est une approche unique visant à « produire des individus capables de donner un sens à leur vie, en respectant leur nature ». Elle repose sur une philosophie assez controversée pour ses potentielles dérives sectaires : l’Anthroposophie
L’objectif est d’éduquer l’enfant « dans son ensemble, c’est-à-dire la tête ; le cœur, et les mains ». En d’autres termes l’approche éducative vise à développer les savoirs, la distance critique vis-à-vis de ceux-ci ainsi que « l’intelligence de la main », pour citer un ex premier ministre. Le curriculum, s’il suit globalement le parcours académique classique, l’enrobe de multiples activités manuelles et artistiques, afin de mieux développer les capacités d’expression de soi des élèves.
Les professeurs ont pour principale mission de favoriser chez leurs élèves un amour de l’apprentissage afin de rendre ces derniers autonomes : en utilisant volontairement – et en pleine conscience – les arts ou les activités manuelles pour renforcer l’apprentissage des programmes académiques, l’élève est censé développer une « soif de savoir » le poussant à développer continuellement des compétences nouvelles. L’apprentissage n’étant plus un « Chevalet des X et des Y » pour citer Victor Hugo, mais bien au contraire une chose agréable à l’élève ; celui-ci développerait de manière autonome ses capacités – et ce sans la contrainte des notes des examens et de la compétition induite par ces derniers….
En quoi la méthode diffère-t-elle des pédagogies traditionnelles ?
De manière générale
Le programme Waldorf est conçu pour répondre aux différentes phases du développement d’un enfant. La relation entre l’enfant et l’enseignant est, de même, reconnue pour être à la fois cruciale et changeante tout au long de l’enfance et du début de l’adolescence : si l’enseignant accompagne une classe pendant plusieurs années, les enfants vont eux construire un rapport différent à ce dernier au fur et à mesure qu’ils construisent leur personnalité.
Les sujets principaux, tels que l’histoire, les arts de la langue, la science et les mathématiques, sont, , enseignés dans les principaux modules, qui représentent deux à trois heures par jour – chaque bloc se durant de trois à cinq semaines environ.
La pédagogie Waldorf a été comparé à une spirale ascendante: les sujets sont revisités plusieurs fois, mais chaque nouvelle exposition offre une plus grande profondeur et de nouvelles idées sur le sujet spécifiquement traité.
En maternelle
Durant les toutes premières années scolarité (en grande section maternelle) le focus des établissements waldorf ne sera pas du tout mis sur l’acquisition de compétences académiques mais sur le savoir être (expression de soi, capacité artistiques et manuelles). Cependant ces premières acquisitions participent grandement à la construction des compétences préscolaires : attitudes en groupe, participation en classe, relation avec l’enseignant(e)…
A l’école primaire
La préparation à l’alphabétisation s’il débute à la maternelle l’apprentissage formel de la lecture débute lui en en cours préparatoire (la première année de l’école primaire). Selon le cadre pédagogique établi, l’objectif est que la plupart des enfants lisent de façon indépendante au milieu ou à la fin du CMI.
Durant l’école primaire les enfants vont avoir un enseignant qui, à l’image de l’approche Montessori, les accompagnera durant plusieurs années (jusqu’à la fin du primaire généralement). Durant ce cursus l’approche waldorf va investir une grande partie du temps pédagogique sur des matières généralement jugée un peu futile par le cursus classique de l’Education Nationale : arts (Musique, dessin…), ateliers d’expressions créatives (Théâtre..), activités manuelles (jardinage), sportive (randonnées en forêt…) ainsi que l’apprentissage précoce des langues étrangères (généralement deux). L’utilisation des moyens artistiques pour soutenir l’apprentissage est systématique dans la mesure ou la base de la pédagogie Steiner postule l’inefficacité des méthodes reposant sur la lecture ou l’apprentissage par cœur.
C’est aussi la raison pour laquelle il n’y a pas dans ces établissements de livres de cours et ce jusqu’au collège. Les enfants entretiennent eux même leur cahier d’apprentissage qu’ils renouvelleront tous les ans. Ils y reporteront l’ensemble des expériences menées durant l’année et y noterons ce qu’ils en ont appris. Dans certains cas- et pour les dernières années d’école élémentaire, des livres de grammaire et de mathématiques pourront être demandé. Mais c’est selon l’établissement – la pédagogie en elle-même ne préconisant pas l’adoption de tels ouvrages avant la sixième.
Enfin il n’y a aucune compétition durant le primaire, ce qui veut dire qu’il n’y a aucune note donnée : seule une évaluation complète est menée chaque année par le professeur pour chaque élève.
Par ailleurs, les écrans, comme les médias électroniques, sont très fortement déconseillés et ne seront absolument pas utilisés en classe. La télévision notamment est proscrite et les parents sont fortement encouragés à ne pas laisser les jeunes enfants la regarder (que ce soit sur internet ou par la TNT : c’est le contenu qui dérange et non le contenant).
Rudolf Steiner et l’anthroposophie : la base idéologique de la pédagogie Waldorf
Si l’anthroposophie est à la base de la pédagogie Waldorf-Steiner ; elle n’est néanmoins pas (officiellement) enseignée dans les cursus.
Rudolf Steiner était un érudit humaniste, scientifique, écrivain et philosophe du début du XXieme siècle. Né en 1861 dans l’actuelle Croatie (mais qui était à l’époque partie intégrante de l’Empire Autrichien) il meurt en Suisse en 1925.
Très respecté et connu pour son travail d’interprétation et d’explication des écrits scientifiques du romantique allemand Goethe, il est persuadé qu’il existe une dimension spirituelle accessible à tous via l’intuition. Cette intuition permettrait à chacun d’exprimer sa nature réelle et de comprendre son environnement, au-delà des signes perçus par les sens habituels (ouie, vue…) . A la base de ses théories, se trouve sa volonté de conjuguer recherche scientifiques et développement spirituel afin de créer une approche scientifique pour le développement personnel. C’est sur cette volonté qu’il construit les bases d’une approche philosophico-spirituelle : l’anthroposophie qui s’inscrit très profondément dans le mysticisme un peu bouillonnant des romantiques allemands et de certaines influences orientales à la limite de l’ésotérisme (inspirés de l’astrologie, de tradition occultes plus ou moins développées) – ce qui était au final assez à la mode en ce début du 20ieme siècle.
Le terme «anthroposophie» vient du grec «Anthropos-Sophia» ou «sagesse humaine» ; il désigne un courant de pensée postulant qu’il n’existe aucune limite à la connaissance humaine des choses. L’’intuition soutenue par un travail continu de la pensée, d’un développement moral abouti et d’une pratique méditative intense et variée, ouvrirait aux êtres humains la perception de la dimension spirituelle de chaque chose (c’est l’intuition transcendantale). En résulte une sorte d’état de « pleine conscience » qui est utilisé ici au sens littéral – c’est-à-dire sans lien avec les courants psychologiques qui l’utilise.
En d’autres termes, Steiner créé une méthode qui se considère comme scientifique et qui vise à permettre la recherche sur soi-même dans un contexte spirituel. Cette science spirituelle, vue comme le complément logique des sciences naturelles (qui s’impose à l’individu) est considérées comme étant la science de la connaissance et la reconnaissance de son humanité, constituée de ses forces (l’expression sous toutes ses formes permettant de libérer toutes les facultés de l’intelligence) et ses faiblesses (les dérives autoritaires de l’état ou de l’économie par exemple). Celle-ci stipule que par l’étude et l’observation pratiquée, on s’éveille à sa propre nature intérieure et aux réalités spirituelles de la nature extérieure et du cosmos (sic). La conscience de ces relations apporte un plus grand respect envers soit même (être un citoyen libre) et envers les autres (être un bon citoyen dans la citée) et ce tout au long de la vie
L’anthroposophie veut s’appliquer à tous les domaines : éducation (c’est quand même ce domaine qui nous occupe !), médecine (médecine naturelle, homéopathie..), cosmétique (alliance du beau et de l’utile – de manière naturelle : par exemple la marque Weleda), économique (la Nouvelle Economie Fraternelle qui fait office de précurseur du micro-crédit voir du crowdfunding actuel), agricole (les toutes premières approches sur la biodynamie – un des thèmes phare de l’agriculture bio contemporaine) et artistique (eurythmie ou l’art s’exprime au travers de mouvements coordonnés du corps en réaction à un son)
L’anthroposophie est considérée comme une approche du respect qui se veut exhaustive : respect de la nature à travers une agriculture biodynamique ; respect de la nature humaine au travers d’une médecine homéopathique ou «naturelle », respect de son intelligence au travers d’une volonté de protéger l’individu des « violences collectives » que sont l’économie et les pouvoirs politiques.
Le cas de la médecine est plus préoccupant dans l’approche anthroposophique « dure » : la maladie y est considérée comme un message envoyé par les Dieux pour aider l’individu à vaincre ses péchés dans le cadre de la réincarnation. Ainsi les traitements et les vaccins ne sont pas vus d’un bon œil ces derniers perturbant le cycle de réincarnation en empêchant la maladie elle-même « purificatrice ». La médication est alors considérée comme un handicap au processus Karmique.
Des écoles souvent soupçonnées de dérive sectaire
Si les écoles affirment que l’anthroposophie n’est pas enseignée dans le cadre du cursus, un certain nombre de signes entretiennent néanmoins le doute. Peut-être cette question épineuse est à régler au cas par cas, selon les écoles et la composition du corps enseignant.
Pour rester factuel : en 2000 la Mission Interministérielle de Vigilance et de lutte contre les Sectes présentait un rapport non pas sur les écoles Waldorf mais sur la galaxie « anthroposophique » dans lequel elle s’intéressait néanmoins à la pédagogie utilisée suite à une inspection des écoles effectuées l’année précédente. Si le rapport conclu qu’il n’y a pas de raison de qualifier l’anthroposophie comme une dérive sectaire il insiste néanmoins pour que l’Etat garde reste très vigilant. En conséquence une nouvelle inspection des écoles Steiner est menée l’année suivante.
L’inspecteur Général affirme alors que ces écoles ne sont pas de nature sectaire, mais que néanmoins le très faible taux d’enfant vacciné en leur sein représente une menace d’hygiène et pourrait induire leur fermeture. En réaction à cela, les écoles se sont mises en conformité dès l’année suivante.
Il faut souligner que l’Etat s’est alors autorisé en 2001 à proposer des contrats d’association – induisant ainsi une forme de reconnaissance.
Mais les doutes persistent : un écrit d’un ex professeur expliquant que si les liens entre école et anthroposophie ne sont pas directs, ils existent au travers de la vie de l’école et l’attitude générale des enseignants. Une plainte pour diffamation émise par la fédération des écoles Steiner-Waldorf en France s’en suit mais le plaignant est débouté au motif qu’il s’agit juste d’une réflexion sur l’anthroposophie elle-même et ses modes de propagation – notamment au sein des écoles du mouvement. Ce faisant le juge reconnait une forme de prosélytisme antroposophiste au sein des établissements Waldorf.
Plus inquiétant, un revirement de la Mission Interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives Sectaires ou cette dernière mentionne dans un rapport au Premier Ministre Waldorf comme une pédagogie faisant partie « des pratiques défavorablement connues de la Mission ». Ils ajoutent que ces dernières possèdent un certain nombre de points commun avec le courant « New Age » notamment un corpus de croyance en l’ésotérisme et l’astrologie.
Bonjour,
je vous conseille l’écoute de ce podcast, faisant un état des lieux de ce qu’est réellement la “pédagogie“ Steiner. On est bien loin de la prise en compte des singularités, dans un cadre qui laisse libre cours aux dérives les plus graves : https://www.metadechoc.fr/shocking-5-gregoire-perra. Promouvoir un tel système est n’a rien d’anodin.